P6 – Quelles bonnes raisons ont-ils tous de se comporter ainsi  ?

Cette série d’analyse utilise plusieurs grilles, c’est donc plus un processus organisant une série  d’analyse qu’une simple grille d’analyse. Elle aurait pu aussi s’appeler, et d’ailleurs c’est ainsi que nous l’appelons souvent, la chasse aux Bonnes raisons .

Cas d’utilisation de ce processus d’analyse

Ce processus est très utile lorsqu’au sein d’une organisation, une situation d’échec se reproduit et qu’il semble qu’une population entière soit responsable, par ses comportements, de ce résultat. 

Par exemple, un de nos clients nous a formulé le problème suivant : “Tous mes projets sont soit en retard, soit hors budget, car nos chefs de projets ne savent pas faire”. Dans cette manière de présenter les choses, le problème est assez clair (“les projets sont soit en retard soit hors budget”) et la population concernée est également bien identifiée (“les chefs de projets”).

Bénéfice d’utiliser ce processus d’analyse ?

Ce processus va permettre de guider une série d’analyse qui permettra :

  1. D’identifier pourquoi la population concernée se comporte ainsi
  2. Surtout, suivant le processus, d’aider les dirigeants à comprendre comment agir pour que cela change. C’est le point le plus important.

Attention ce processus d’analyse agit sur deux dimensions : une dimension analytique et une dimension pédagogique. Le premier bénéfice est d’ordre analytique : il permet à un petit nombre (le consultant souvent) de mieux comprendre. Il est très bien décrit dans tous les livres d’analyse sociologique. 

Le second bénéfice concerne lui la diffusion large de cette compréhension et il est amené par le processus, la manière de s’y prendre.

Références et Origines

Ce processus d’analyse pourrait aussi s’appeler l’analyse stratégique, tout simplement puisque c’est ainsi que l’appelait Crozier, mais cela prêterait à confusion avec l’analyse de la stratégie de l’organisation.  

Description du process à suivre

Reprenons ces cinq étapes

Exemple de formulation de l’étape 1
  1. Définir le problème, sous la forme « nous n’arrivons pas à … » parfois appelé plafond de verre par extension de l’image du plafond de verre des femmes n’arrivant pas à atteindre les derniers échelons d’une organisation. Nous recommandons vivement d’écrire ce problème et de chercher un consensus sur les termes employés car la précision des termes aide chacun à mieux comprendre le problème.
  2. Une fois le problème identifié il faudra alors cartographier les acteurs en utilisant le Sociogramme. De cette cartographie on identifiera la population clef, celle qui a un comportement qui pose problème. 
  3. Puis on va chercher à comprendre ce comportement en le modélisant à partir d’une analyse de leur contexte en utilisant l’ERC. A l’issue de cette modélisation on aura donc identifier pourquoi, pour atteindre leurs objectifs compte tenu des contraintes et des ressources à leur disposition, cette population se comporte comme elle se comporte.
  4. Puis nous allons formuler des hypothèses expliquant le comportement et ainsi expliquant le problème
    1. Cette hypothèse se formule sous la forme d’une phrase explicative sous la forme d’une phrase à trou “Pour [atteindre ses enjeux] …. Et éviter de [faire face à ses contraintes] …. Le [population concernée] utilise [ses ressources] ce qui mène à [le problème identifié en 1]”
    2. Cette phrase se remplit à partir des étapes précédentes.
    3. Généralement cette phase d’hypothèse est itérative : on fait des hypothèses, on va les tester, elles se révèlent partiellement fausses, on approfondit l’analyse (par exemple en reformulant l’ERC) puis on identifieun nouveau jeu d’hypothèse et ainsi de suite jusqu’à ce notre modèle tourne. Pour les tester, le plus simple c’est de les présenter aux personnes concernées. Et quand vous avez trouvé, elles vous disent “vous comprenez vraiment ma vie!”.
  5. Une fois que le modèle « tourne » alors on peut chercher les leviers pour changer le système.
    1. Pour s’aider dans la quête des leviers on peut s’inspirer des règles de Smart Simplicity.
    2. La plupart des leviers sont basés sur une bonne compréhension du contexte, donc de l’ERC. Ils viseront généralement soit à diminuer les contraintes, soit le plus fréquemment à augmenter les ressources.

Le processus d’analyse en vidéo 

Voici ce que donne le processus d’analyse sur un exemple issu de Smart Simplicity.

201803 ANALYSE interlodge (source Smart Simplicity)

Astuces d’animation

Nous avons longtemps discuté de savoir s’il vaut mieux faire ERC d’abord (c’est plus simple) et ensuite sociogramme. Aujourd’hui nous croyons qu’il faut suivre la méthode au fond, c’est-à-dire cartographier d’abord les acteurs puis expliquer les comportements. En premier lieu, la cartographie sert alors de point d’entrée dans l’analyse. De plus, comme on ne cherche pas la régulation des mauvaises relations, mais simplement l’information, cela fonctionne. Enfin nous ne croyons pas que la régulation soit compatible avec l’élaboration. Ce sont deux énergies différentes. Donc dans un processus d’analyse comme celui-là il ne faut pas chercher à ce que les acteurs se réconcilient. Dernier argument et non des moindres, l’ERC est assez difficile à réaliser car trouver le véritable enjeu demande du temps, il faut tâtonner car les acteurs n’ont pas conscience de leurs enjeux. Par exemple, le réceptionniste n’avait pas conscience qu’il cherchait à éviter la grogne des clients. Lui, il cherchait simplement à bien faire son travail. Pour pouvoir aider les participants à distinguer leur véritable enjeu, il est très précieux d’avoir toutes les informations possibles, notamment sur les relations facilitantes et difficiles.

Point d’attention et limite

  • Si cette analyse est très pertinente pour une population identifiée, lorsque l’on a beaucoup de populations impliquées c’est plus compliqué.
  • Comme cette analyse concerne par nature des tiers, il est très aisé de tomber dans l’interprétation plutôt que de vraiment chercher les “bonnes raisons”.
  • Pour la même raison, il est parfois difficile d’embarquer les dirigeants dans “l’esprit” de l’analyse.
  • Ce processus demande des itérations, attention à ne pas vouloir aller trop vite à la solution.

Astuces d’animation pour bien embarquer les dirigeants

Pour bien embarquer les dirigeants il faut prévoir plusieurs ajustements :

  • Tout d’abord le problème (l’étape 1 ci-dessus) doit être bien défini avec les dirigeants en amont.
  • Ensuite on doit aussi identifier la population clef (étape 2) car l’idée c’est de réunir un échantillon de cette population cible pendant au moins 3h pour faire avec eux l’analyse de leur situation (leur ERC).
  • Enfin on doit calibrer les objectifs des différents temps de travail : dans la majorité des cas il sera impossible d’arriver jusqu’à l’étape (4) des hypothèses en une seule réunion. 
    • Ce calibrage impacte le dispositif puisqu’en fonction des objectifs il faudra prévoir plusieurs réunions de l’échantillon de population avec, ou non,  coordination entre ces réunions.
    • Il est souvent plus efficace de faire une première réunion avec un échantillon de la population concernée, chercher les hypothèses puis les réunir une fois suivante pour tester ces hypothèses.

Protocole spécifique de la réunion d’ErC

Une fois que nous avons identifié la population et réunit tout le monde dans une même pièce, le protocole à suivre est le suivant : 

  1. Baromètre  sur la question « Comment je me sens dans mon job ?». Cette première étape vise à la fois à collecter de l’information et au skills building
  2. Ensuite Sociogramme selon la méthode présentée dans le post.
  3. Puis ERC  idem avec la méthode présentée.
  4. Enfin, si on la temps, test d’hypothèse

Bien entendu à la fin de la réunion il faut envoyer le travail aux participants.

Pour aller plus loin

Pour aller plus loin, bientôt ici une liste de ressources.

Retour à la liste des grilles.

Publié par La Boetie Partners

Game Changing Conversations, voir www.laboetiepartners.com

Laisser un commentaire

%d blogueurs aiment cette page :